Luna Negra - Bayonne 2010

L'Avenue des Croisements

 

La salle était remplie ce soir du jeudi 7 Octobre, à la Luna Negra, à l'occasion de la représentation de "L'Avenue des Croisements. Pendant que le public entrait, ils n’en menaient pas large, de l’autre côté, vous savez, derrière la scène encore plongée dans le noir, plus loin que derrière les coulisses ; là où ils venaient de se taper un petit dîner sur le pouce, certains volubiles, d’autres muets, chacun y allant de sa manière d’aborder les dernières minutes avant le clic des projecteurs. Fins prêts, ils se sont tus, après que le régisseur soit venu dire : on y va.


Musique. Plus le temps de réfléchir, ni de se répéter les répliques en secret, plus le temps de rien si ce n’est plonger sur la scène maintenant éclairée.


Voici venu l’instant où les mots posés noir sur blanc sur papier prennent corps et vie. Les spectateurs ont réagi dès les premières minutes, sensibles aux nuances multiples du texte interprété sur une mise-en-scène originale. Les yeux rivés sur mes compagnons, un doigt sur le bouton « on » du son, l’autre main tourne machinalement les pages du recueil malmené à force d’être trimballé d’une répétition à l’autre, d’un spectacle à l’autre. Au bout d’un moment, je finis par moins trembler, mais je ne serai tranquille qu’au moment du salut, pas avant. Les comédiens ont assuré jusqu'au bout et au-delà, dans une qualité de jeu et de présence qui n'a échappé à personne.


A l'issue de la pièce, je consacre quelques minutes à un échange avec le public, pendant que les comédiens se rafraîchissaient avant de revenir sur scène pour la seconde partie de la soirée. Il faut un peu de temps pour que le public revienne du voyage qu’ils viennent de faire. Puis les commentaires surgissent, certains marquant la stupéfaction, d’autres la curiosité, tous manifestant de l’intérêt autour du montage de L'Avenue des Croisements. Et puis nous dévions sur le thème du théâtre tel que notre groupe l’aborde et le vit. Nous pourrions en parler des heures durant, un tel sujet ne se vide pas de sitôt.


Les impros qui ont suivi n'ont pas été anodines. Innovantes dans le fond et la forme, tour à tour hilarantes et intensément émotionnelles, elles ont démontré au public médusé et extrêmement réactif les multiples possibilités à explorer autant que les capacités d'adaptation dans le déclic de l'instant, toutes porteuses de créativité sans cesse renouvelée.


Après les applaudissements nourris et l'extinction des projecteurs, ces femmes et ces hommes venus nous voir ont longuement prolongé les échanges, définitivement conquis avec, au fond des yeux et de la gorge, l'expression d'un émerveillement représentant la plus belle des reconnaissances.


- Vous disiez tout à l’heure que les Souffleurs de Rêve sont une troupe amateurs. Vous êtes sûre de ne pas vous être trompée ? Vous êtes sûre de ne pas être professionnels ?


- Oui, Madame….